Quelle place accordez-vous à la concertation avec les locataires ?

Information, consultation, concertation … coproduction ! Autant de mots pour une même philosophie : celle de replacer le locataire à sa juste place, celui de client.

Au-delà de la sémantique, quelle importance faut-il donner à la « participation des locataires » ? Comment le fait d’associer les habitants peut-il hisser les débats vers le haut ? L’échange avec les locataires permet-il réellement d’imaginer des solutions viables et précieuses pour la réussite de vos projets ? Pourquoi avons-nous parfois (souvent ?) des réticences (des craintes ?) à associer les clients – locataires à nos réflexions ?

Extrait et (très) librement traduit du site internet DILBERT ©

Et vous, dans quelle mesure laissez-vous la parole à vos locataires ? Avez-vous réussi à mettre en place une relation gagnant – gagnant ?

Quelle place accordez-vous à la concertation avec les locataires ?

Avons-nous actuellement une réelle culture de la concertation ?

Dans de nombreux domaines (aménagement, infrastructures, …), il n’est plus possible aujourd’hui d’envisager la réalisation d’un projet important sans organiser une consultation ou une concertation.

Le secteur de l’habitat (et donc notre secteur de l’habitat social) ne fait pas exception.

Les thématiques de concertation se diversifient chez les bailleurs, et sur des projets variés. Mais cela reste encore de l’expérimentation. Nous constatons que tous les bailleurs n’ont pas forcément encore acquis dans leurs gênes la mise en œuvre de démarches participatives. A l’heure où les projets de résidentialisation ou de réhabilitation thermique foisonnent, les habitants ne sont pas toujours associés dès la conception. A l’heure où le bien vivre ensemble se dégrade, nous recherchons souvent des solutions externes. Pourquoi ?

Ces types de projets constituent pourtant une excellente opportunité de prise en compte de l’expertise d’usage des locataires dans leur conception. La parole des habitants est trop souvent cantonnée au vote organisé suite à la réunion publique d’information pour les opérations d’amélioration entraînant une augmentation de loyer. Ils expriment alors uniquement leur acceptation, ou non, du projet. Peut-on réellement parler de concertation, dans ce cadre ?

Vous avez dit « concertation » ? Quelles sont les obligations en la matière ? Il y en a en fait très peu

Les relations entre le bailleur et les locataires ont été institutionnalisées par la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain :

 Cette fameuse « loi SRU » prévoit la création de Conseils de Concertation Locative, composés de représentants des locataires et de représentants du bailleur : ils doivent se tenir régulièrement (au moins une fois par an) pour étudier des questions d’intérêt général telles que la gestion de l’immeuble, l’entretien, les travaux d’amélioration, la sécurité, les charges locatives, …
 La loi prévoit également une concertation avec les locataires dans le cas d’opérations d’amélioration entraînant une augmentation de loyer. Les locataires sont alors consultés sur la consistance des travaux envisagés et sur l’augmentation de loyer qui en résulte.
 Enfin, des accords locatifs collectifs peuvent être passés entre les locataires et le bailleur en vue d’améliorer la qualité du service.

Et …, c’est à peu près tout. Mais avec la ROL, obligatoire dans la seconde CUS, et avec la loi ALUR, les dispositions réglementaires renforcent les nécessités de concertation.

Quels enjeux et quelles plus-values pour les bailleurs à travailler avec les locataires ? Faut-il craindre de les mettre en œuvre?

Dans bien des domaines, on ne sait pas faire sans les locataires

Depuis plusieurs années, nous assistons aux restructurations des résidences (celles construites dans les années 60, 70) qui ne correspondent plus aux attentes actuelles des habitants. Plus de sécurité, plus d’intimité … ces nouveaux besoins aboutissent à la multiplication des opérations de résidentialisation. Toutefois, il n’est pas rare que ces travaux de grande ampleur soient entrepris pour les locataires, mais … sans même y associer les habitants !

Et finalement, c’est après l’aboutissement des travaux que l’on découvre les erreurs de conception :

 Problèmes de circulation piétonnière
 Problèmes de sécurité liés à des pratiques préexistantes non identifiées,
 Difficultés d’appropriation des lieux par les habitants pour cause d’inadéquation à l’usage des lieux …

Il est alors courant de devoir revoir sa copie, et de revenir sur les travaux effectués pour corriger les défauts. C’est alors que les enveloppes budgétaires explosent.

Pourquoi ne pas prendre en compte l’expertise d’usage des habitants ? Pourquoi prendre le risque de faire fausse route, de perdre du temps et de l’argent ? La sollicitation de l’expertise d’usage des habitants, via une démarche de co-production, permet d’éviter de passer à côté de certaines problématiques. N’oublions pas que nous avons un regard de bailleur, pas forcément de locataire : les habitants peuvent aisément contribuer à vos réflexions, à la seule condition … de les y associer. 

Eviter les réactions de rejet
La co-production permet de mobiliser les habitants sur les projets, de les impliquer, et ainsi d’obtenir une adhésion naturelle et progressive. Certes, ce n’est pas simple. Certes, cela demande du temps. Mais qui a dit que votre métier de bailleur était une sinécure ? C’est bien parce que cela n’est pas simple que c’est à vous de le faire. Si les bailleurs sociaux ne donnent pas la parole à leurs locataires, et n’intègrent pas les habitants dans leurs réflexions, qui le fera pour eux ?

Faire émerger une culture du partenariat, plutôt qu’une culture de l’opposition et du rapport de force
Les démarches participatives changent le mode de rapport bailleur – locataire. Cela amène les habitants à coopérer de manière productive et profitable aux projets. Cela les place en acteurs du changement. Par exemple, la participation des habitants s’intègre parfaitement aux politiques RSE que vous mettez en place, soit sous le label RSE, soit tout simplement dans le cadre de votre politique quotidienne.

Travailler votre image pour le bailleur
Les bailleurs ont aussi à y gagner en termes d’image, en adoptant la posture de l’organisme qui s’emploie à être au plus proche des besoins et des attentes des clients, en véritable écoute ! A l’heure où la concurrence entre bailleurs s’accroit sur l’accès au foncier dans les zones tendues, à l’heure de la concentration, à l’heure où les Oph départementaux voient leur collectivité locale de rattachement perdre en influence, il convient de réussir à se démarquer de vos confrères. La concertation peut être l’un de ces leviers.

Comment la concertation est-elle vue par les associations de locataires ?

« Développer ensemble des services aux habitants », Aminata Koné, secrétaire générale de la Confédération syndicale des familles (CSF),
 « Renforcer le dialogue en amont sur les loyers », Serge Incerti-Formentini, président de la Confédération nationale du logement (CNL),
 « L’expertise des habitants est indispensable sur les questions énergétiques », Valérie Gervais, secrétaire générale de l’Association Force Ouvrière consommateurs (AFOC),
 « Nous sommes les mieux placés pour détecter les situations de précarité », Michel Fréchet, président de la Confédération générale du logement (CGL),
 « Impliquer les habitants sur la thématique du développement durable », Simone Bascoul, vice-présidente de Consommation Logement et Cadre de Vie (CLCV), en charge du secteur habitat.

(Témoignages extraits du site de l’USH « Le Mag » – 2013)

Quels sont les différents degrés possibles d’implication des habitants ?

L’échelle de la participation contient plusieurs niveaux, selon lesquels les locataires ont plus ou moins la possibilité de s’exprimer, et selon lesquels leur parole est plus ou moins prise en compte.

L’implication des habitants va de la simple information à la co-production en passant par la concertation.

Les différents niveaux de participation :

 1) L’information est portée à connaissance du public dans une démarche descendante, autrement dit, c’est le pouvoir d’information des locataires (ex : information sur l’appropriation d’un logement BBC).
 2) La consultation consiste à écouter les locataires concernés par un projet sur des aspects précis, mais sans pour autant que cela influence la conception du projet, c’est le pouvoir de se faire entendre.
3) La concertation est le premier niveau de participation active des habitants. Le locataire donne un avis qui influencera le projet. C’est le cas du vote après réunion publique pour des projets d’amélioration engendrant une augmentation de loyer. C’est le pouvoir d’entendre et de se faire entendre.
4) Enfin la co-production est le niveau de participation à travers lequel les habitants vont participer activement à un projet, en y étant associés dès le départ. Les habitants sont pleinement intégrés à la réflexion, à la conception et à la mise en forme du projet. C’est le pouvoir de coproduire ensemble.

La co-production permet au bailleur de travailler avec les futurs « utilisateurs » ou « usagers » sur des projets comme :

la production d’une nouvelle offre de service (ex : mise en place d’échanges de services entre locataires, développement d’une gestion de proximité, maintien à domicile des personnes âgées, …),
la résidentialisation ou réhabilitation d’un groupe bâti,
l’habitat participatif,
la conception de l’offre de services et du rôle des agences de proximité,
la conception du site internet des bailleurs et des services extranet proposés aux locataires,
la réalisation du cahier des charges des logements,

Il n’y a en fait pas de limites.

La co-production peut parfois être employée à une échelle plus globale. Certains organismes poussent le concept jusqu’à la mise en place d’une gouvernance partagée, en créant des dispositifs participatifs qui permettent d’intégrer les locataires à la prise de décision dans un maximum de domaines (c’est le cas de l’OPAC 38 qui fait parti des organismes pionniers en ce domaine, notamment sous le dynamisme de Monsieur Benoit JEHL, Directeur de la Direction Développement Durable et Europe).

La valeur ajoutée de vos locataires : le locataire idéal n’est pas uniquement celui dont on s’aperçoit qu’il existe le jour … de sa lettre de dédite !

La valorisation de la parole des locataires s’entend également en création de « valeur ajoutée » pour le bailleur. Créer des dynamiques, une émulsion autour des projets, et la maîtrise de l’expertise d’usage, sont autant d’éléments qui permettent de mener les projets à termes en évitant les impasses.

La co-production implique de donner la parole aux habitants tout en plaçant la communication dans un cadre défini par des règles du jeu. Il existe des techniques visant à apaiser les débats. On peut citer :

 L’écoute et la prise en note des doléances au début des échanges : cela permet de « purger » le débat de toutes les préoccupations des locataires qui peuvent parasiter les échanges.
La responsabilisation : l’explication des limites (budgétaires, urbanistiques, …) permet une auto-responsabilisation des habitants qui vont naturellement prendre en compte les contraintes.
La pédagogie : nous nous adressons à des publics qui peuvent rencontrer des difficultés dans l’appropriation des thématiques.

La dynamique de co-production passe également par l’organisation d’évènements participatifs. Leur rôle est de casser les barrières qui peuvent exister entre le bailleur et les habitants. Les locataires ont tendance à se sentir dans une position de subordination vis-à-vis du bailleur, qu’ils associent couramment à une autorité publique. Les évènements participatifs contribuent à assainir l’ambiance, à créer une dynamique de groupe qui sera bénéfique lors de la production, et à éviter de rester dans un rapport de subordination, peu productif, et qui risque d’amener un climat de contestation.

Comment aidons-nous les bailleurs mieux prendre en compte la parole de leurs locataires ?

Expert dans l’accompagnement des bailleurs sociaux sur la conception et l’animation des actions de valorisation de la parole des locataires, notre cabinet est notamment à votre disposition pour :

Réaliser des études de territoires et des contextes locaux (démarche indispensable pour identifier les enjeux, dynamiques, perceptions entre les différents acteurs, …),
Mettre en œuvre une démarche de co-production dans le cadre de vos travaux d’amélioration,
Mettre en place des dispositifs de médiation,
Définir comment préserver conjointement la propreté et la tranquillité dans les parties communes,
Animer vos réunions publiques, réunions de travail et « cafés débats » avec les locataires,
Concevoir vos nouvelles offres de services en coproduisant avec les locataires,
Organiser des évènements participatifs,
Et bien sûr, … vous accompagner dans l’amorce d’une culture participative au sein de votre organisme.